CHARLES FLOUTARD

Personne, si l’on veut être de bonne foi, ne peut dire qu’il connaît vraiment Charles Floutard. Pas plus l’homme que le peintre. Comme tous les êtres sensibles, il a l’abord affectueux et discret. Sa masse physique se déplace en souplesse, bonhomme, évitant d’écraser, au propre comme au figuré, les pieds de quiconque. Placide, il accepte le plus souvent de faire beaucoup de concessions, lorsqu’on discute, mais on ne tarde pas à remarquer qu’il ne cède jamais pour l’essentiel. Une phrase lui vient souvent aux lèvres : «Me suis-je bien fait comprendre ?». Elle traduit parfaitement le souci de ne pas transiger sur quelques idées-forces. On le croit malléable et il suffit d’un mot, d’une idée qui heurtent son éthique intime, et voilà le débonnaire qui prend la mouche ; le verbe enfle, le geste balaie l’argument.

Le fin causeur devient tribun, il se lève, tonne, secoue l’auditoire, et véhément, clame sa passion. Médusée, l’assistance subit le flot éloquent, surprise, presque choquée. Pourtant, quand le tumulte s’apaise, il en est plus d’un qui regrettent de n’avoir pas noté la diatribe. Ainsi se libèrent, aux limites de l’excès, les hommes de sincérité profonde. Leur conviction est un acte de foi et, de ce fait, s’exprime en lance-flammes. Avec Floutard, l’homme de culture, si l’argumentation, sur ce qui a vraiment de l’importance, est souvent explosive, elle n’en est pas moins enrichissante pour ceux qui la recueillent. ­­

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